Diariste, épistolière, autrice de nouvelles érotiques, aventurière : Anaïs Nin, écrivaine franco-hispano-américaine, a vécu une vie sans entrave, guidée par la liberté, et une volonté d’émancipation. Elle a écrit un grand nombre de romans, mais doit sa notoriété à son « Journal d’amour », le récit intime de sa vie, dans lequel elle raconte ses relations passionnelles et amoureuses avec les auteurs Henry Miller ou Antonin Artaud. Celles qui Osent revient, le temps d’un article, sur la vie de l’audacieuse Anaïs Nin.
Anaïs Nin : figure littéraire française et américaine
Rose Jeanne Anaïs Edelmira Antolina Nin naît en 1903 à Neuilly-sur-Seine. Ses parents sont originaires de Cuba, alors une province espagnole d’outre-mer au moment de leur naissance. Le père d’Anaïs, Joaquin, et compositeur de musique et pianiste. Sa mère, Rosa, est une chanteuse d’origine franco-danoise. Le couple, rongé par l’adultère du père, se sépare en 1914, et Rosa part vivre à New York avec ses trois enfants. Élevée au sein d’un milieu artistique et intellectuel, Anaïs Nin quitte le collège à 14 ans et commence à faire du mannequinat.
Elle épouse, à l’âge de vingt ans, le banquier Hugh Parker Guiler à Cuba, avec qui elle part vivre à Paris en 1924. C’est d’ailleurs en français qu’elle écrit son Journal d’enfance, qui raconte son adolescence à New York, de 1914 à 1920. Anaïs Nin écrit ses premiers ouvrages à Paris. Son premier livre est une critique des oeuvres de D.H Lawrence, auteur, entre autres, de L’amant de Lady Chatterley, roman qui raconte l’éveil sexuel et l’adultère commis par une aristocrate anglaise avec son garde-chasse. Elle s’intéresse également à la psychanalyse, et fréquente des disciples de Sigmund Freud.
Henry Miller et Anaïs Nin : une rencontre et une correspondance passionnée
Henry Miller et Anaïs Nin se rencontrent à l’automne 1931. Elle a 28 ans, il en a 40. Il est un écrivain reconnu, et fascine Anaïs, dont la relation avec Hugh Parker Guiler est alors à bout de souffle. Commence ainsi une relation adultère qui durera une dizaine d’années, et eu l’effet d’une passion créatrice. Lui s’apprête à publier Tropique du Cancer, dont Anaïs Nin écrira la préface, qui sera interdit par la censure américaine jusqu’en 1961. C’est d’ailleurs grâce à l’argent de Hugh, le mari d’Anaïs, que le livre sera diffusé. Pour cela, Henry se rendra chez le couple, à Louveciennes, en Île-de-France, accompagné de June, sa femme, avec qui Anaïs Nin aurait entretenu une relation amoureuse.
Henry et Anaïs se séparent en 1940, alors qu’Henry Miller est retourné aux États-Unis. L’écrivaine, elle aussi, quitte la France pour New York, à l’annonce de la Seconde guerre mondiale et de l’arrivée des Allemands. Malgré leur rupture, Henry Miller continuera d’entretenir une amitié solide et littéraire avec son ancienne amante, qu’il encouragera à publier ses journaux intimes. Il lui écrit, en juillet 1941 :
« Tu seras tout à fait acceptée, et même royalement, quand paraîtra ta grande œuvre. Je veux parler du Journal… Je suis d’avis de le publier dans son ensemble depuis le tout début. Je crois que ton Journal est vraiment plus important que toutes mes œuvres réunies. »
Journaux intimes et notoriété tardive
Agnès Desarthe, écrivaine et traductrice d’Anaïs Nin, explique, dans une interview accordée à France Culture :
« Son parcours est très individuel et très individualiste. En cela, Anaïs Nin n’est pas une penseuse, elle n’est pas une théoricienne. Elle n’a pas écrit des livres qui aident à vivre. […] Elle n’écrit pas du développement personnel. […] Son parcours traverse la vie à gué, en supposant que les rochers sur lesquels elle s’appuie sont des hommes, parfois des femmes. C’est ce qui lui permet de traverser la vie. Elle est extrêmement soumise à cette loi, comme si elle n’était pas totalement autonome. […] Il y a à la fois cette Anaïs Nin là, et il y a l’autre qui est l’artiste qui est d’une puissance extraordinaire. »
Le journal d’Anaïs Nin est composé de plus de 35 000 pages. Elle a fondé son écriture sur un principe d’honnêteté, du « tout dire », quitte à choquer et à provoquer, ce qui l’a empêchée de publier son oeuvre de son vivant, d’autant plus qu’elle relate de nombreux adultères dans ses écrits, (alors ignorés par Hugh Parker Guiler) ainsi que des relations incestueuses avec son père.
En 1955, l’autrice, alors séparée, mais pas divorcée de son mari, épouse l’ancien acteur Rupert Pole, rencontré lors d’une soirée à New York. C’est son second mari qui publiera ses journaux de manière posthume.
Anaïs Nin décède en 1977 d’un cancer des cervicales, à Los Angeles.
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Victoria Lavelle pour Celles qui Osent
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1 Comment
J’ai adoré lire tous ses journaux, certains plusieurs fois. Cela me donne envie de les relire, quelques décennies après, car je ne suis plus la même qu’il y a 10 ou 20 ans…