Son nom ne vous dit rien ! Pourtant elle mérite sa place dans le registre des femmes exceptionnelles. Souvenez-vous de cette jeune fille vouée à une vie ordinaire dans une société patriarcale du début du XXe siècle. Oui, il s’agit bien de Suzanne Noël, une féministe, la première chirurgienne esthétique. Définitivement libre et visionnaire, elle réclame simplement le droit pour les femmes de disposer de leur corps et de leur destin sans être soumises. Celles qui osent revient sur le profil de cette femme extraordinaire, pionnière de la chirurgie esthétique. Un parcours qui fait écho en chacune de nous.
Une femme libre qui assume ses choix
«La femme contient le problème social et le mystère humain. Elle semble la grande faiblesse, elle est la grande force. » (V. Hugo.)
Un destin tout tracé
Née en 1878, Suzanne vit seule avec sa mère dès son plus jeune âge à Laon. Son père ainsi que ses frères et sœurs sont morts prématurément. La jeune enfant est douée de ses mains. Elle brode, dessine, rêve et aime la décoration, mais elle s’ennuie. À 19 ans, elle part à Paris où elle épouse Henri qui est dermatologue. La place que lui impose la société ne lui convient pas. Mais, elle a la force de vouloir réaliser ses ambitions alors improbables.
La médecine comme évidence
Encouragée par son mari praticien, Suzanne commence ses études de médecine à 27 ans et se passionne très vite pour la chirurgie et la dermatologie. Elle y rencontre l’amour de sa vie, André Noël, étudiant comme elle. C’est alors qu’enceinte de sa fille, elle se spécialise en chirurgie esthétique. Nous sommes en 1909 et Suzanne effectue ses premières opérations réparatrices à mains nues. Elle doit affronter un monde masculin et ses détracteurs lui reprochent d’émasculer les hommes en les pénétrant de ses mains féminines. Mais la passion qui brûle en elle ne s’éteindra plus.
Suzanne Noël, féministe et première chirurgienne esthétique
«Ce qui est combat dans le présent est victoire dans l’avenir. » (V. Hugo.)
Réparer les corps pour soigner les âmes
Devenue une femme engagée, pionnière de la chirurgie esthétique, elle propose à la grande Sarah Bernhardt de lui reprendre un lifting raté. Son cabinet de la rue de Floquet ne désemplit plus. Mais Suzanne envisage son métier comme un combat, celui de faire valoir les vertus thérapeutiques de la chirurgie esthétique. En réparant les corps, elle veut soigner les âmes. La Première Guerre mondiale lui permet alors tristement de progresser dans son art. Ses mains remodèlent dans des conditions précaires les visages des gueules cassées. Son époux meurt en 1918 après avoir inhalé des gaz de combat. L’année suivante, elle se remarie avec André. Mais le destin s’acharne : il se suicide, désespéré, après le décès de leur fille, victime de la grippe espagnole. Néanmoins, Suzanne reste debout et plus que jamais, déterminée.
Réparer les corps pour se reconstruire
C’est une évidence. Courageuse et pragmatique, elle décide de lutter pour le droit des femmes à disposer de leur image et leur choix de vie. Elle est convaincue de l’utilité de la chirurgie esthétique pour braver le chômage, la dépression, jusqu’au harcèlement scolaire. C’est ainsi qu’elle recolle les oreilles, rajeunit les femmes jugées trop vieilles pour travailler. C’était déjà d’actualité. Elle est totalement désintéressée, les patients la paient selon leurs moyens. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle redessine les visages de résistants et de juifs recherchés. Elle efface aussi les stigmates des camps sur la peau des internés.
La place de la femme dans la société : le fil rouge de sa vie
«La liberté est de savoir danser avec ses chaînes. » (F. Nietzsche.)
Désirer être belle sans être soumise
Suzanne Noël ne cesse de porter l’image de la femme libre qui lui est chère. Faire appel à la chirurgie esthétique est une nécessité et non une frivolité. Désirer être belle ne veut pas dire être soumise. Par sa vision profondément moderne qui fusionne le physique et le psychique, elle réinvente sa passion. Elle remodèle les corps et crée les outils pour pratiquer son art. Révolutionnaire à l’époque, elle sculpte les seins, les ventres, les fesses et met au point la liposuccion.
Soroptimist : sœurs pour le meilleur
Suzanne est une militante pour le droit de vote et une féministe convaincue. Elle est la fondatrice de la section française du club service Soroptimist, un réseau de solidarité en faveur du mérite et de l’émancipation des femmes, qui voit le jour en 1921. Elles sont combatives et sœurs de cœur dans la France d’entre deux guerres. Elles ont été celles qui osent. Suzanne ne cesse de communiquer dans le monde entier sur l’importance de la valorisation des femmes dans la société moderne.
Au-delà de sa figure de pionnière de la chirurgie esthétique, Suzanne Noël est une femme moderne et humaniste. Dans la souffrance de sa vie privée, elle a su tirer une force qu’elle a mise au service de tous, sans aucun jugement. Sa conception de la chirurgie esthétique à usage thérapeutique se construira au fil des décennies, libérant celles qui veulent être belles, sans être soumises. Disposer de son corps et de son destin : voilà le message que nous transmet Suzanne Noël jusqu’à sa mort en 1954. Le privilège de son génie et le silence qui lui succède nous murmurent encore au creux de l’oreille : « Assumez vos choix pour être libre ! C’est là notre force. Alors, osons ! »
Fanny Demollière pour Celles qui osent
En attendant notre prochain article, n'oubliez pas de suivre notre podcast sur ces Femmes qui Osent
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