Oser broder des vulves – Rencontre avec Max le Con

La boutique Etsy de Max le con questionne. Partout, on y découvre des dessins ou des broderies colorés aux motifs plus qu’évocateurs. Max le con à l’art de sublimer la vulgarité, en abordant le politiquement incorrect lié à la sexualité, au genre et au rapport au corps. J’apprends qu’il s’appelle Margaux. La jeune trentenaire est une talentueuse illustratrice lilloise, designer de produits de formation. Indéfinissable, cette artiste « touche à tout » brode des vulves en écoutant des podcasts. Bienvenue dans l’univers doux, coloré, plutôt osé de Max le Con !

La genèse des vulves

Depuis l’enfance, Margaux est captivée par les questions de genre : est-ce parce que son schéma familial est légèrement différent des autres ? En effet, c’est Mario, son père, qui l’élève. Après un Brevet de Technicien supérieur en Design de Produits à l’ESAAT de Roubaix, une année d’Erasmus en Angleterre puis un master de design à Lyon, elle ne trouve (étonnamment ?!) pas de travail dans le design, alors elle enchaîne les petits boulots. De caissière de supermarché aux missions free-lance de bouche à oreille, Margaux observe et crée. Après une furtive formation pour créer sa propre entreprise, elle décroche un poste de créatif « fourre-tout » au sein d’une société de rasoirs et de brosses à dents à Roubaix. « Dans ce travail en salariat, je m’emmerdais, alors je me suis mise à dessiner des bites sur des carnets de notes. Un jour, en regardant toutes ces bites, je me suis demandé pourquoi je ne dessinais pas aussi des vulves. Je crois que c’est exactement comme cela que cela a commencé. » max-le-con-art-broderie

La vulve, le dessin inratable

Elle se baptise rapidement Max Le Con. Joli pseudo. La genèse de ce surnom provient d’un jeu de Pokémon Pinball. En effet, c’était son pseudo en trois lettres sur la game boy. De plus, le con définit aussi le sexe de la femme dans un langage vulgaire. Voilà. Max le Con est né. La jeune femme aime à dire qu’elle est « plusieurs » : Margaux, la « femme enfant », Margarita la danseuse séductrice et Max. Depuis l’enfance, elle est ultra timide et c’est bien plus tard lors de ses études à Lyon qu’elle se libère grâce à la danse. Par le mouvement, elle s’approprie son corps et l’apprivoise, enfin. Max, quant à lui, hurle « fuck » à la société patriarcale et au politiquement correct.

« Depuis la nuit des temps, les gens aiment le cul, les corps, prendre du plaisir. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes gens ont envie de vivre des relations plus légères, plus assumées, mais n’osent pas toujours. Les médias parlent de sexe, partout, et pour autant les jeunes ne sont pas toujours à l’aise dans leur sexualité. »

Après avoir côtoyé le monde polyamoureux, elle est intimement persuadée que les Hommes ne sont pas faits pour vivre ensemble. En couple avec Tarik depuis deux ans et demi, elle ne vit d’ailleurs pas avec son amoureux et vient d’acheter son appartement seule. Elle ressent aussi des sentiments très forts pour certains de ses amis, si bien qu’elle ose avouer que sa propre frontière entre amitié et amour est ténue dans son cœur. C’est avec toutes ces incertitudes, mais en étant persuadée d’être aussi paumée que pleins d’autres, qu’elle décide de créer des produits « osés et culottés ». Margaux s’éparpille souvent dans ses idées. « Mes sujets favoris ? La vulve, le vagin, les « boobs », les fleurs et les phrases du cul ! Graphiquement, une vulve c’est une forme informe hyper intéressante, car elle me permet de jouer avec les textures, les formes ou les contrastes. Vraiment, il est quasiment impossible de rater une vulve ! » me dit-elle amusée.

se former à la rédaction web

max-le-con-art-broderieOn adhère vite à ses phrases chocs : Girl Power, petite salope, slurp, viens parler à minou, j’ai la chatte qui colle, la moule à zéro, protégeons les zones humides… Elle dessine en mixant les techniques : crayons de couleur, feutres de calligraphie et encre de chine. Le résultat produit est vraiment poétique, empreint de couleur et de naïveté. « J’ai dessiné pendant de longues années aux feutres fins noirs, de façon très épurée, minimaliste. Après avoir voyagé à Marrakech et au Mexique, j’ai eu le déclic : graffitis de toutes les couleurs, robes et jupes brodées, pompons… Finalement, je me mets à oser les couleurs, même flashy. Cela me fait vibrer, tant pis pour le « too much ». »

Broder le sexe féminin

L’illustratrice brode aussi. La broderie, c’est un « passe-temps de grand-mère » certes. Qui prend du temps, mais cela la détend. C’est son arrière-grand-mère qui lui a appris à broder « si elle savait ce que j’en fais aujourd’hui, cela la ferait beaucoup rire ! ». Cet art décoratif désuet redevient tendance, preuve en est le nombre de créatrices qui « dépoussière » la technique. Margaux travaille à la main, à l’aiguille, majoritairement avec des tissus et des laines qu’elle récupère chez Emmaüs. Elle aime travailler la laine. Le rendu grossier crée des reliefs, des aspérités que l’on a envie de toucher, de caresser. Dans sa boutique en ligne, elle vend des stickers vulves, des dessins de femmes nues ou des cous-seins à toucher. Étonnamment, ses inspirations graphiques, elle les trouve dans le monde du tatouage. Elle adhère complètement à l’univers de Chantal Frontal. Mordue de podcasts qui parlent du rapport aux genres, au corps et au sexe, elle travaille en écoutant « les couilles sur la table » de Victoire Tuaillon, « the boys club », « Génération XX », « Entre nos lèvres » et les chroniques de Maïa Mazaurette. Plus le temps passe, plus elle aime écouter « des propos moins édulcorés », le parler-vrai.

Osez parler minette et vagin !

Margaux aime aussi se perdre des heures sur Pinterest, et décorer son appartement très instagrammable. Elle espère retrouver ses illustrations ou ses broderies sur des murs, des étagères, dans des cadres, chez les gens, même les « coincés ». Forcément, ses productions touchent surtout un public féminin, ou très ouvert à l’imagerie sexuelle et féminine. « Parlons « minette », « zézète » ou de « faire RMMM RMMM ». Mon but n’est pas de choquer gratuitement, mais de libérer la parole : non ce n’est pas grave de débander en mettant une capote, de détester que l’on vous malaxe la poitrine ou de galérer à mettre une cup. » Si vous voulez pimper votre décoration intérieure, n’hésitez pas à découvrir sa boutique : https://www.etsy.com/fr/shop/MaxLeCon, ou sur insta @maxlecon.

L’artiste est une femme libre qui n’aime pas les contraintes, surtout celles qui sont liées à sa condition de femme. Elle assume sortir sans soutien-gorge, ne s’épiler que quand elle a envie, faire le choix de vivre seule. Max le con adhère aux idéologies féministes actuelles, sans être 100 % radicale. Par exemple, elle a une trottinette électrique ornée d’un bel autocollant L214 (association de défense des animaux), mais ne s’empêche pas de manger un bon bifteck de temps en temps… On aurait presque hâte de l’inviter à dîner, ce sympathique Max le con !

Violaine B – Celles qui Osent

En attendant notre prochain article, n'oubliez pas de suivre notre podcast sur ces Femmes qui Osent

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