Son nom ne vous dit probablement rien. Et pourtant, Carole Roussopoulos est l’une des réalisatrices les plus importantes de son époque. Née en 1945 en Suisse et décédée en 2009, elle a réalisé plus de 120 documentaires et est l’une des toutes premières vidéastes. Ses films décrivent le combat des femmes dans les années 1970, de l’avortement en passant par la lutte des personnes homosexuelles. Celles qui Osent revient sur la biographie de Carole Roussopoulos et lui rend hommage le temps d’un article.
Biographie de Carole Roussopoulos : ses débuts de vidéaste
À l’âge de 22 ans, Carole Roussopoulos quitte la ville de Sion, où elle a passé son enfance, pour Paris, où elle commence à travailler pour le magazine Vogue. Mais au bout de deux passés au sein de la rédaction, elle se fait licencier. Familière des cercles littéraires et artistiques parisiens de cette époque, son ami l’écrivain Jean Genet lui conseille d’investir dans la première caméra portable, la Sony Portapack. Elle devient la première femme à s’en saisir et incarne une figure de réalisatrice engagée, caméra au poing.
Ayant pris conscience du pouvoir que lui conférait cette petite caméra portable, Carole Roussopoulos fonde le collectif militant Video out. Nous sommes en 1971, et trois ans après Mai 68, les contestations sociales sont toujours aussi vives, en particulier pour ce qui concerne les revendications féministes. Elle devient vite une référence dans les milieux militants, ainsi que ceux du journalisme et du cinéma.
« Mes images vous appartiennent »
Tout au long des années 1970, Carole Roussopoulos couvre les luttes sociales de tous les côtés : les grèves ouvrières, les combats anti-impérialistes (comme les Black panthers par exemple), les revendications des personnes homosexuelles (elle suit le Front homosexuel d’action révolutionnaire à l’occasion d’un documentaire). Mais le mouvement qu’elle a le plus couvert, c’est sans doute le féminisme. En 1971, elle réalise Y a qu’à pas baiser.
Les violences sexistes et sexuelles, comme le viol, passent également devant sa caméra. Dans Le tabou des tabous, tourné en 1984 au sein de son collectif Video out, elle dénonce l’inceste et ce qu’elle appelle « la conspiration des oreilles bouchées ». De l’excision à la toxicomanie, en passant par les soins palliatifs chez les personnes âgées : elle ne cesse de repousser les limites de son art et de travailler sur de nouveaux sujets. Peu de temps avant sa mort en 2009, elle expliquait :
« Je me réveille le matin et je me dis : ’’ça, il faut que ça s’arrête’’. Ce qui m’intéresse, c’est d’avoir un petit levier d’action sur la réalité, en toute modestie, car je n’ai jamais pensé qu’une bande vidéo allait changer le monde. C’est la conjoncture, la rencontre de gens à un moment donné, qui fait bouger les choses. Et alors, l’image et mon énergie peuvent effectivement intervenir. C’est une question d’énergie, plus que d’esthétique. Et une question de colère, un mot que j’aime beaucoup. Je trouve que la colère est quelque chose d’extrêmement positif. C’est ce qui fait qu’on ne s’endort pas ».
Les Insoumuses et sa collaboration avec Delphine Seyrig
En 1974, Carole Roussopoulos collabore avec l’actrice féministe Delphine Seyrig (la fée des Lilas dans le Peau d’Âne de Jacques Demy) à l’occasion de deux vidéos pamphlétaires, Maso et Miso vont en bateau (détournement parodique de l’émission télévisée Apostrophe, très célèbre à l’époque) et une lecture du SCUM Manifesto, de Valerie Solanas (une activiste féministe américaine et ouvertement misandre).
Les deux femmes créent, aux côtés de Ioana Wieder, une autre réalisatrice féministe, les Insoumuses, originellement les Muses s’amusent. Toutes les trois, elles tournent des vidéos de dénonciation sociale, souvent avec une touche d’humour parodique. Dans Maso et Miso vont en bateau, un de leurs films les plus célèbres, elles se moquent de l’émission télévisée de Bernard Pivot dans laquelle Françoise Giroud, alors secrétaire d’État à la condition féminine, avait été invitée pour commenter les propos sexistes d’hommes politiques. Les trois femmes s’accordent alors un droit de réponse en ponctuant la vidéo de chants et de slogans féministes.
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L’histoire du féminisme français vous intéresse ? Ça tombe bien, un article lui est dédié sur notre site.
Victoria Lavelle pour Celles qui Osent
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