Son nom est longtemps resté inconnu, et pourtant sans Margaret Hamilton, l’homme n’aurait pas posé le pied sur la Lune. Directrice du département de génie logiciel à la NASA, c’est une pionnière dans le domaine de l’informatique. Elle sait s’imposer et insiste pour intégrer un algorithme à l’ordinateur embarqué de la navette spatiale, qui permet d’éviter l’échec de l’alunissage d’Apollo 11. Cheffe d’entreprise, elle apporte une avancée majeure dans le monde de la programmation. Beaucoup de personnes qui travaillent aujourd’hui dans la sphère de l’informatique ne pensent pas que le créateur du codage moderne est en fait une créatrice. Voici l’histoire de celle qui a osé inventer le génie logiciel.
Margaret Hamilton, une amoureuse des mathématiques, pleine d’ambition
C’est le 17 août 1936 que naît Margaret Hamilton, à Paoli dans l’Indiana. Dès son plus jeune âge, elle adore l’école et c’est une très bonne élève. Les mathématiques la passionnent et très vite, elle se tourne vers le codage qui l’intrigue. Après son enseignement secondaire, elle part étudier dans le Michigan, à l’Earlham College. Elle obtient sa licence en mathématiques à 22 ans.
Elle choisit de déménager à Boston, pour soutenir son mari qui suit des cours de droit à Harvard. Mais elle n’abandonne pas son apprentissage ! Initialement, elle souhaitait poursuivre une maîtrise de mathématiques à l’Université de Brandeis, mais une occasion se présente. À 24 ans, elle intègre le prestigieux MIT (Massachusetts institute of Technology) où elle occupe le poste de programmeuse. Dans les années 1960, elle développe des algorithmes de prévision météorologique sur les premiers ordinateurs existants : les LGP-30 et PDP-1.
Par la suite, elle sera engagée pour travailler sur le projet militaire SAGE, au laboratoire Lincoln du MIT. Ce projet secret avait pour but de réaliser un programme informatique, afin de détecter les avions qui traversaient l’espace aérien des États-Unis.
Une femme indépendante qui s’impose dans un milieu « geek » et masculin
C’est peu de temps après que Margaret Hamilton rejoint la NASA, où elle œuvre sur le système d’exploitation du programme Apollo lancé par John F. Kennedy. Avec son équipe, elle est chargée de coder les tout premiers logiciels sur les ordinateurs embarqués dans les fusées. Ces logiciels s’occupent de faire tous les calculs nécessaires pour le décollage et l’alunissage.
Pour mener à bien ses recherches, Hamilton est amenée à travailler très tard. À cette époque, elle élève seule sa fille de 4 ans, Lauren, et doit l’emmener dans les bureaux de la NASA. Cela est souvent mal vu par son entourage, qui lui en fait le reproche. Mais Margaret ne se laisse pas déstabiliser par ces réflexions. Elle est habituée à faire face à de telles remarques qui sont courantes dans les années 60. Elle assure dans une interview pour le site Wired en 2015 qu’elle appréciait cette ambiance « geek ». Cette femme se trouvait peut-être dans un milieu masculin, mais elle affirme qu’au laboratoire elle était « l’un des gars ».
La pionnière de l’ingénierie logicielle
À cette époque, l’ingénierie et la technologie étaient des domaines où l’on voyait peu de femmes. Margaret Hamilton était donc une exception. Avec ses collègues, elle a inventé les bases de la programmation moderne, une décennie avant l’apparition de Microsoft. Personne ne parlait de logiciels dans les universités, aucun calendrier ni budget n’était alloué à cela. Margaret a même créé l’intitulé de son poste : « software engineering » ou en français, ingénieur logiciel.
Le dispositif de la navette Apollo a pris plusieurs années à bien fonctionner, et Hamilton en était responsable. Elle a affirmé dormir très peu, de peur de faire des erreurs dans ses codes, car tout reposait sur ses épaules. Une course pour atteindre la Lune était lancée entre les États-Unis et l’URSS.
En 1968, près de 400 personnes travaillaient sur le système d’exploitation d’Apollo. La programmation à cette époque ne ressemblait pas à ce que l’on fait maintenant. L’ingénieur logiciel perçait des trous dans des piles de cartes perforées, qui étaient ensuite traitées par lots, sur un ordinateur central Honeywell géant. Le but de ces actions était d’effectuer des simulations, pour être certain que tout fonctionnait avant le départ des astronautes. Les vols Apollo transportaient deux dispositifs portables, les premiers de l’histoire. Ces machines ne pesaient pas moins de 30 kg et constituaient les tout premiers systèmes de navigation embarqués informatisés.
La sauveuse méconnue de la Mission Apollo
Un jour, alors que Lauren, la fille de Margaret, jouait avec le simulateur du module de commande du MIT, un message d’erreur est apparu. Elle avait allumé un programme de prélancement et l’appareil s’était écrasé. Margaret a donc imaginé ce qu’il pourrait se produire si l’un des astronautes déclenchait un protocole incorrect. En allant voir ses supérieurs pour exprimer son inquiétude, personne n’a cru cela possible. On lui a répondu que les ingénieurs de la NASA avaient été formés pour ne pas faire d’erreurs.
Mais la mission Apollo 8 a donné raison à la scientifique. Les astronautes ont effectivement lancé le mauvais programme et l’expédition a avorté. Hamilton a donc présenté une solution. Elle a créé un algorithme asynchrone qui autorisait l’ordinateur embarqué à choisir les protocoles à effectuer en priorité. Lors de l’odyssée d’Apollo 11, l’informatique à bord de la navette spatiale s’est vu submerger par trop d’informations. Un radar continuait d’émettre et utilisait trop d’énergie. Le programme de l’ingénieur Hamilton a permis à la machine d’abandonner ce processus et de se concentrer sur l’alunissage.
Une figure féminine de la NASA reconnue tardivement pour son travail
Sans le travail de l’ingénieur Hamilton et de son équipe, Neil Armstrong n’aurait jamais posé le pied sur la Lune ! Dans un communiqué de presse en 2003, la NASA accorde les honneurs à Margaret.
C’est en 2016 que Barack Obama récompense cette ingénieur logicielle, pionnière dans son domaine, avec la médaille présidentielle de la Liberté, prix également attribué à Maya Angelou, cette grande poétesse au service de la liberté. C’est la plus haute distinction civile américaine que l’on puisse obtenir. Le président des États-Unis affirme lors d’un discours : « Elle symbolise cette génération de femmes méconnues qui ont aidé à envoyer l’humanité dans l’espace ».
De nos jours, cette éminente scientifique reste dans les mémoires comme la mère des logiciels et de la programmation contemporaine. Dans les années 1970, elle quitte la NASA et apporte de nombreuses contributions dans le monde de l’informatique en travaillant dans plusieurs entreprises. Elle fonde finalement sa propre société, Hamilton Technologies inc. Aujourd’hui, sa compagnie aide à moderniser le processus de planification, d’ingénierie système et de développement de logiciels.
Marjolaine Poulain, pour Celles Qui Osent
Sources :
- https://www.theguardian.com/technology/2019/jul/13/margaret-hamilton-computer-scientist-interview-software-apollo-missions-1969-moon-landing-nasa-women
- https://www.france24.com/fr/20161122-margaret-hamilton-grace-hopper-deux-pionnieres-tech-decorees-barack-obama
- https://www.wired.com/2015/10/margaret-hamilton-nasa-apollo/
- https://www.franceculture.fr/sciences/margaret-hamilton-la-femme-qui-a-fait-atterrir-lhomme-sur-la-lune
- https://www.youtube.com/watch?v=4sKY6_nBLG0&t=29s
- https://ed.ted.com/lessons/the-software-that-sent-humans-to-the-moon-matt-porter-and-margaret-hamilton
- https://history.nasa.gov/alsj/a11/a11Hamilton.html
3 Comments
[…] un autre destin incroyable au féminin, qui a marqué l’histoire de la conquête spatiale, avec Margaret Hamilton. Comment a-t-elle permis l’alunissage des programmes Apollo, avec la NASA […]
[…] filles. Si vous avez aimé cette biographie de Katherine Johnson, vous aimerez aussi celle de Margaret Hamilton qui a également travaillé à la […]
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