Maya Angelou | une plume de poète au service de la liberté

Qui est Maya Angelou ? Difficile de donner un titre à cet être exceptionnel qui a reçu en 2010 la Médaille présidentielle de la Liberté, la plus haute distinction civile aux États-Unis. Au cours de sa vie elle est passée de danseuse pour les night-clubs de San Francisco à militante pour les droits civiques auprès de Martin Luther King et Malcolm X. Son extraordinaire parcours a déjà inspiré plusieurs générations et a donné une voix à la communauté de femmes noires aux États-Unis. Elle a fait de sa vie des livres, des poèmes et surtout un message d’émancipation pour toutes celles qui veulent vivre libres !

L’enfance bouleversante de Maya Angelou

Survivre malgré les traumatismes

Née sous le nom de Marguerite Annie Johnson, le 4 avril 1928, dans le Missouri. Ses parents se séparent alors qu’elle n’a que 3 ans. Avec son frère, d’un an son aîné, elle est envoyée vivre chez sa grand-mère. Les deux enfants font le voyage en train en direction de l’Arkansas, seuls et transportant avec eux un fort sentiment d’abandon. Quatre ans plus tard, ils repartent vivre chez leur mère.

À l’approche de ses 8 ans, Marguerite se fait violer par le petit ami de sa mère. Elle n’en parle qu’à son frère, mais celui-ci le répète aux membres de leur famille. L’homme est retrouvé assassiné peu de temps après. Pensant qu’elle est responsable de la mort de son agresseur pour avoir prononcé son nom, la jeune fille cesse totalement de parler. Il lui faudra presque 5 ans pour sortir de son mutisme.

La littérature : un appui pour se construire

C’est à cette époque que Marguerite développe son amour pour de nombreux écrivains tel que Dickens, Shakespeare, Allan Poe, Weldon Johnson. Elle est aussi très inspirée par des écrivaines afro-américaines comme Georgia Douglas Johnson et Frances Harper, Anne Spencer et Jessie Fauset. Elle développe une épatante mémoire, une grande habileté pour écouter et observer le monde qui l’entoure et une véritable passion pour la poésie.

Quelques semaines après être diplômée du lycée, elle devient une très jeune mère en donnant naissance à son fils, Guy Johnson. Au cours de sa vie, Maya témoigne plusieurs fois de l’amour immense qu’elle porte à son fils unique et de la gratitude qu’elle ressent pour avoir été mère.

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Un début tumultueux dans la vie active en pleine période de ségrégation raciale

Premier emploi, première victoire

Dès son entrée dans le monde du travail, Marguerite utilise la force de sa volonté pour bousculer la discrimination. Elle se présente pour un emploi de conductrice de tramway à San Francisco. Les bureaux ne lui donnent même pas l’occasion de déposer une candidature. La jeune femme a littéralement organisé un sit-in, venant s’asseoir dans les locaux tous les jours. Au bout de deux semaines, elle obtient le poste. Elle n’avait alors que 16 ans et poursuivait en parallèle ses études.

Une mère monoparentale confrontée à la pauvreté

Par la suite elle s’installe en Californie. Afin de survivre et nourrir son fils qu’elle élève seule, elle travaille comme cuisinière, serveuse et danseuse dans des boîtes de nuit. Elle a également enlevé la peinture des voitures à mains nues dans un atelier de mécanique. Puis, dans un contexte accablant de très fort taux de chômage, Maya se tourne un temps vers le commerce du sexe, comme elle le décrit dans Rassemblez-vous en mon nom, publié dans sa version originale en 1974.

C’est tout l’art du style franc de cette écrivaine qui fera de sa vie un message fort de lutte pour la survie et la liberté. Elle utilise d’ailleurs des images puissantes et, dans ses autobiographies, réinterprète les événements selon son ressenti. Elle démontre avec ses textes qu’on peut défendre son droit de se redéfinir selon ses valeurs. Elle permet alors aux femmes noires, de ne pas accepter leur condition comme une fatalité. Elle participe à rétablir l’égalité pour cette population très vulnérable, non seulement victime de xénophobie, mais en plus déconsidérée en raison de leur genre féminin. Maya clame que chaque existence a la même valeur, ce qui n’était pas absolument pas accepté en pleine période d’institutionnalisation du racisme aux États-Unis.

L’envol d’une danseuse, qui devient chanteuse puis actrice

Dans les années 1950, elle se produit en spectacle avec une équipe de danse appelée « Al et Rita », puis en solo elle choisit le nom de scène Maya Angelou. Repérée pour ses performances, elle part en tournée en Europe en tant que choriste avec la compagnie d’Opéra Everyman’s.

En 1957, elle enregistre Miss Calypso, son tout premier album. La même année, elle fait ses débuts en tant qu’actrice dans le film Calypso Heat Wave pour lequel elle chante et interprète ses propres compositions.

Son implication dans le mouvement américain pour les droits civiques

Des rencontres qui forgeront son engagement

En 1959, elle s’installe à Harlem pour se consacrer à l’écriture sur les conseils de son ami, l’auteur James Baldwin. La même année, elle rejoint la Harlem Writers Guild, où elle rencontre d’autres grand·e·s auteur·e·s, dont Rosa Guy et Julian Mayfield qui sont également des militant·e·s pour les droits des afro-américain·es aux États-Unis.

Rapidement Angelou s’engage aux côtés de Martin Luther King. Elle assure le poste de coordonnatrice dans l’une de ses organisations du Southern Christian Leadership Conference.

Son amitié avec Malcolm X

En 1961, elle part vivre au Caire avec son fils, accompagnant l’activiste sud-africain et avocat Make Vusumzi. Elle travaille alors comme rédactrice associée au journal hebdomadaire anglophone The Arab Observer. Lorsqu’elle se sépare de Make en 1963, elle part avec Guy vivre au Ghana. Elle trouve un poste de rédactrice en chef à l’African Review et elle écrit en tant qu’auteure indépendante pour le Ghanaian Times. Pendant ces années, elle devient proche de Malcolm X et retourne aux États-Unis, en 1965, pour l’aider à construire une nouvelle organisation de lutte pour les droits de la population noire. Peu de temps après, Malcolm X est assassiné. Maya est dévastée par sa mort.

Un deuxième leader qui disparaît

En 1968, Martin Luther King lui demande de rejoindre son organisation. Le 4 avril, le jour de son 40e anniversaire, son ami et leader militant est à son tour assassiné. Très affectée par sa mort, Maya commence à faire une dépression dont l’écrivain James Baldwin l’aidera à sortir. Son engagement politique ne la quittera cependant jamais, dans les années 1970, elle siégera à deux comités présidentiels. Plus tard, elle soutiendra Bill Clinton, Hillary Clinton et Barack Obama.

 

La consécration d’une écrivaine plusieurs fois récompensée

Le premier volet d’une autobiographie en 7 volumes

Encouragée par son grand ami James ainsi qu’un éditeur, Robert Loomis, Maya écrit son premier roman autobiographique. La maison d’édition Random House publie en 1969 I Know Why the Caged Bird Sings, qui sera édité en France en 1980 sous le nom de Je sais pourquoi l’oiseau en cage chante. Son premier livre fait le portrait de son enfance jusqu’à la naissance de son fils. Il se présente comme un roman initiatique où d’une enfance très difficile, elle s’est élevée au rang de jeune femme sûre d’elle et militante civile.

Ce livre bouleverse la controverse à cause de l’honnêteté de son auteure au sujet, entre autres, des abus sexuels et du racisme dont elle a été victime, ouvrant la conversation sur de nombreux tabous. En dépit de cela, il lui valut une renommée internationale.

De nombreuses récompenses pour l’œuvre de toute une vie

En choisissant de romancer ses autobiographies, Angelou est devenue une pionnière de l’écriture de soi. Elle y dépeint une vie pour laquelle elle a réussi ce tour de force extraordinaire : savoir en apprécier toutes les nuances, avec ses exploits et ses luttes, sa beauté et sa laideur. En racontant son histoire, elle donne également une voix à l’histoire collective de toutes les afro-américaines des années 1930 à 1960.

Au cours de sa vie, elle sera par 3 fois la gagnante des Grammy Awards pour ses albums parlés dans lesquels elle a enregistré ses livres et ses poèmes.

C’est en 2013, l’année qui précède son décès, qu’elle publie sa 7e et dernière autobiographie Lady B pour témoigner de sa relation avec sa mère. Cette même année, elle reçoit le Literarian Award pour service exceptionnel rendu à la communauté littéraire américaine. Au cours de sa carrière, elle a écrit 36 livres dont 30 furent des titres à succès.

Des poèmes qui magnifient les femmes noires et leur histoire

Un militantisme en proses

La poésie et Maya Angelou, c’est une histoire d’amour. Son premier ouvrage Just Give Me a Cool Drink of Water ‘Fore I Diiie, publié en 1971, reçoit le Prix Pulitzer l’année suivante. Poète prolifique, elle rédigera 17 recueils pour parler notamment de la vie des noir·e·s et de leur beauté, de la force des femmes et de la justice sociale pour tous. Elle aborde les sentiments profondément ancrés d’injustice et de protestation d’une population contrainte à la soumission, devant lutter pour assurer une survie de base.

Extrait de And Still I Rise | Publié en 1978

Vous pouvez m’abattre de vos paroles (You may shoot me with your words)

Me découper avec vos yeux (You may cut me with your eyes)

Me tuer de toute votre haine (You may kill me with your hatefulness)

Mais comme l’air, je m’élève encore. (But still, like air, I’ll rise.)

Ces vers résonnent encore dans bien des esprits. Face à l’adversité, cette femme d’une grande sagesse vous conseillerait : « Si tu n’aimes pas quelque chose, change-le. Si tu ne peux pas le changer, change ton attitude. » Angelou, c’est la force inébranlable qui célèbre l’existence avec passion, qui lutte pour sa liberté et celle des autres.

Comme une douce revanche sur la vie, cette femme de lettres qui a vu son premier livre largement censuré par les institutions scolaires, est devenue plus tard professeure et académicienne. La liste des hommages qui lui ont été rendus est immense. Elle a reçu plus de 50 doctorats honorifiques et plus de 30 établissements de soins de santé et médicaux portent son nom.

Militante pacifique, elle nous a fait cadeau d’un héritage à vocation humaniste. C’est la raison pour laquelle elle est une source d’inspiration qui a traversé toutes les frontières. Vous êtes prévenues ! Pour celles qui ne la connaissent pas encore, ouvrir un livre de Maya Angelou c’est prendre le risque d’être touché en plein cœur.

Méline Troussard

Rédactrice Web SEO

Sources :

  • Site web de Maya Angelou
  • Encyclopedia.com
  • Rassemblez-vous en mon nom de Maya Angelou, édition Noir sur Blanc, (édition originale par Random House en 1974).
  • Singin’ and Swingin’ and Gettin’ Merry Like Christmas de Maya Angelou, édition originale par Random House en 1976.
  • And Still I Rise de Maya Angelou, édition originale par Random House en 1978.
En attendant notre prochain article, n'oubliez pas de suivre notre podcast sur ces Femmes qui Osent

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