Très présent sur les plages dans les décennies passées, il fut un temps où le topless faisait fureur. Mais depuis une dizaine d’années, le bronzage seins nus se fait rare. Pourquoi les femmes ne font-elles plus le monokini ? Dans une société post-Me too, l’on pourrait s’attendre à ce qu’elles soient plus nombreuses à faire tomber le haut, soucieuses de désexualiser leur poitrine. Pourtant, c’est l’inverse qui se produit, comme le montre un sondage Ifop réalisé en 2019 selon lequel moins de 2 femmes sur 10 pratiquent le topless à la plage. Celles qui Osent revient, le temps d’un article, sur l’histoire du monokini et les raisons de sa disparition.
L’origine du monokini
Quand on parle de monokini, la première image qui nous vient à l’esprit est celle d’une femme aux seins nus. Pourtant, cette appellation désignait, à l’origine, un maillot de bain un peu particulier, conçu par le styliste autrichien Rudi Gernreich. Le principe est simple : une culotte en laine à bretelles qui laisse apparaître la poitrine. La première photo du monokini date de 1962 et fait tout de suite scandale. Bizarrement, le modèle connaît un certain succès : durant l’été 1962, plus de 3 000 femmes achètent le maillot en question.
Le monokini atteint les États-Unis, et laisse petit à petit place à la culotte simple, dénuée de ses deux bretelles. Il donne naissance à une nouvelle institution, quoique marginale à l’époque : les bars topless américains. Au milieu des années 1960, en France, la pratique du monokini se popularise à Saint-Tropez, avec des ambassadrices de luxe comme Brigitte Bardot. Peu à peu, avec mai 68 et la révolution sexuelle, les Françaises l’adoptent.
Alors pourquoi les femmes ne font-elles plus le monokini à la plage ?
L’enquête de l’Ifop citée en début d’article, selon laquelle moins de 2 femmes sur 10 pratiquent le monokini ne s’arrête pas là. En effet, elle ajoute que « plus du tiers des 50-69 ans se mettent régulièrement seins nus au bord de la plage, contre à peine 20 % des jeunes Européennes de moins de 30 ans ». Mais pour quelles raisons ? Selon le sociologue Christophe Colera, auteur de La nudité : pratiques et significations, si le seins-nus tend à disparaître, cela serait principalement pour des raisons de santé. En effet, la sensibilisation au cancer du sein est de plus en plus répandue, et les amatrices de bronzette sont bien conscientes des risques. Pourtant, contrairement aux idées reçues, le monokini ne favoriserait pas ce type de cancer : c’est l’exposition de la peau au soleil, peu importe quelle partie du corps, qui est dangereuse.
L’étude de l’Ifop assure par ailleurs que le motif sanitaire est le premier argument donné par les femmes interrogées. On remarque aussi que le rapport au corps et à la pudeur a évolué en cinquante ans : selon 20 % des femmes, « le topless va à l’encontre des femmes et de la religion ». Et 40 % des interrogées affirment que le topless est « impudique ».
Abandon de la pratique du topless : les seins des femmes sont politiques
On se rappelle qu’à l’été 2020, des gendarmes avaient demandé à un groupe de femmes bronzant seins nus de remettre leur haut de maillot. Pourtant, le topless n’est pas interdit par la loi. Et l’enquête Ifop va plus loin. Selon l’étude, 51 % des femmes interrogées craignent, parce qu’elles bronzent seins nus, d’être la cible d’une agression physique ou sexuelle. Et puis n’oublions pas que, même si la société a progressé en la matière, les seins restent tabous et sexualisés, en témoigne la censure faite des tétons sur les réseaux sociaux.
Dans Seins, en quête d’une libération, la philosophe Camille Froidevaux-Metterie explore le rapport des femmes (plus d’une quarantaine) avec leur poitrine. Soutien-gorge, monokini, chirurgie esthétique, cancer, puberté : les récits sont touchants et variés, et nous apprennent que non, les seins ne sont pas une partie du corps anodine, mais sont bel et bien politiques. Une belle lecture d’été !
Victoria Lavelle pour Celles qui Osent
Source :
Ifop.com, Topless, summer body et body shaming : quand les diktats esthétiques et le pression sexuelle empêchent les femmes de se dénuder en été, août 2021
En attendant notre prochain article, n'oubliez pas de suivre notre podcast sur ces Femmes qui Osent
6 Comments
Si je peux me permettre une remarque… Les seins nus disparaissent des plages également parce que les femmes elles-mêmes participent à ce mouvement, en suivant les injonctions de la mode et de la politique plus ou moins consciemment. Il suffit d’une… qui ose… pour que les hauts tombent.
Pour exemple, j’ai moi-même assisté à cela la semaine dernière sur une plage du Var, où plusieurs femmes, simplement en se baignant seins nus, naturellement, en famille et jouant avec leurs enfants, ont incité d’autres femmes de tous âges (dont moi) à faire de même. À plusieurs on se sent moins seule… on se sent juste normale… Cela n’étonne personne… ou en tout cas je n’ai vu personne quitter la plage d’un air outré. Passé le premier moment de surprise, enfants et conjoints n’y ont rien trouvé non plus à redire. Et surtout, quelle liberté !! Ne nous imposons pas de gaines ou carcans inutiles ! Soyons juste nous-mêmes !!
Merci Céline pour votre commentaire et votre partage d’expérience.
Quel dommage de céder à cette pression. J’ai 45 ans je ne porte jamais de soutien gorge sous mes vêtements je ne suis pas prête de m’infliger ça à la plage.
Un peu de pudeur ne nuit à personne, si ça ne vous gêne pas ça en gêne peut être d’autres et tout le monde ne se sent pas aussi à l’aise avec ces pratiques irrespectueuses d’autrui.
Cachez ce sein que je ne saurais voir.
Je fais du sein nu depuis plusieurs années et effectivement je suis bien souvent seule sur la plage ou au bord de l’eau …
Si cela ne plaît pas rien n’empêche de ne pas regarder….
Chaque personne et libre de son corps et de ses choix …bien trop souvent dicté par un monde hommes …
Nous pratiquons le nudisme en couple dans des endroits appropriés et à la maison. Mon épouse a mis du temps mais ne reviendrai sur cette pratique. En tout cas, nous respectons ceux qui ne se dénudent pas en restant en maillot auprès d’eux. La nudité ou les seins nus sans équivoque sexuelle est un vrai vécu de liberté. Je m’étonne des publications on ne peut plus suggestives sur les réseaux et propre au voyeurisme.