Restée dans l’Histoire comme Celles qui a Osé dire « NON », Rosa Parks incarne « la femme qui s’est tenu debout en restant assise » (FranceCulture). Surnommée « La madone de Montgomery » , Rosa Parks, femme forte, militante, œuvrant sans relâche dans la lutte contre la ségrégation est devenue, malgré elle, une icône pour les droits civiques. Celles qui Osent revient sur son parcours militant admirable.
Grandir dans un contexte de ségrégation
Rosa Louise McCauley Parks naît le 4 février 1913 en Alabama, 48 ans après l’abolition de l’esclavage. Elle grandit dans une Amérique marquée par la ségrégation avec les lois « Jim Crow » et le principe du « separate but equal » (séparés mais égaux). Les Noirs doivent traverser la rue si un ou une Blanche est sur le même trottoir, les enfants Noirs n’ont pas le droit au bus scolaire, les Noirs ne peuvent pas voter…Dans une atmosphère de violence marquée par les actions du Klu Klux Klan qui maintiennent les Noirs dans un état de peur permanente, où ceux-ci doivent dormir tout habillé pour fuir en cas de menace, elle réalise chaque jour la dépendance économique et sociale vis-à-vis des Blancs. « Le message de suprématie blanche est tu es noir, donc ta vie ne vaut rien ». Quant à la place des femmes dans la société, qu’elles soient noires ou blanches, elles sont bien évidemment aux fourneaux et s’occupent des enfants.
Après le divorce de ses parents, Rosa Parks part vivre avec sa mère dans la ferme de ses grands-parents. Elle tient à ce que sa fille soit instruite, malgré les nombreuses entraves que subissent les enfants Noirs pour accéder à la scolarité. Sa mère lui fait donc l’école à la maison jusqu’à ses onze ans. Rosa Parks fréquente ensuite les écoles et l’université pour Noirs mais sera malheureusement obligée d’arrêter ses études pour s’occuper de sa mère malade. « Je n’ai jamais eu le corps criblé de balles, ou traîné derrière une auto, mais j’ai souvent ressenti que c’était mon esprit que l’on lynchait. J’ai grandi dans un monde où le pouvoir blanc était surtout utilisé avec cruauté et ingéniosité pour réprimer de pauvres noirs sans défense ».
Un mariage d’amour avec un militant de la cause des droits civiques
Au tournant du XXème siècle, les Afro-Américains partent par centaines de milliers du Sud pour fuir et trouver du travail dans le Nord : des millions de personnes migrent entre 1916 et 1930. L’affaire des Scottoros Boys éclate en 1931, dans un train : neuf jeunes adolescents noirs resquillent. Une bagarre éclate entre des hommes Blancs et eux. Ils sont sortis manu militari et accusés à tort d’avoir perpétrés des viols sur des femmes blanches, sans preuve. “Il y a une jalousie de la part des Blancs pauvres envers les hommes Noirs qui pourraient mieux réussir qu’eux.” Une mobilisation retentissante s’organise ; elle sera le creuset de l’engagement politique de Raymond Parks, un militant de la cause des droits civiques. Les adolescents passeront 20 ans en prison, pour de fausses accusations. La communauté noire est révoltée par cette profonde injustice. Jeunes issus de la classe ouvrière, proches d’organisations de travailleurs socialistes et communistes, Rosa et Raymond découvrent la force de leur engagement et de leur amour. Ils se marient en 1932. Son mari l’encourage à reprendre ses études, et elle obtient donc son diplôme en 1934, dans une époque où seulement 7% des Noirs ont un diplôme du secondaire. Ensemble, ils deviennent membre de la « Montgomery Voters League », une association qui aide les Noirs à réussir les tests nécessaires à l’inscription sur les listes électorales.
Pour subvenir aux besoins du foyer, Rosa Parks exerce plusieurs métiers comme femme de ménage, couturière ou aide-soignante. En effet, bien que diplômée, elle est avant tout noire et ne peut prétendre à d’autres emplois. En 1943, elle devient la secrétaire de Ed Nixon dirigeant de la section NAACP National Association for the Advancement of Colored People locale, l’organisation américaine de défense des droits civiques. Ce poste subalterne ne la destinait en rien à la célébrité.
Oser dire “non” à un Blanc
Le 1er décembre 1955, Rosa Parks monte dans un bus. Elle s’assied dans la partie arrière, celle réservée aux Noirs. Quand un homme blanc arrive, le conducteur somme toute la rangée d’usagers noirs de se décaler pour lui faire une place. Elle refuse, las. C’est une accumulation. Dans ce bus de la ville de Montgomery, elle est arrêtée puis mise en prison. Les adhésions aux ligues blanches progressent dans la ville contre « les negro radicaux ». Inculpée pour désordre public et violation des lois locales, elle dira « les gens racontent que j’ai refusé de céder mon siège parce que j’étais fatiguée, mais ce n’est pas vrai. Je n’étais pas fatiguée physiquement, ou pas plus que d’habitude à la fin d’une journée de travail. Je n’étais pas vieille non plus, j’avais 42 ans. Non, la seule fatigue que j’avais était celle de céder. » L’épisode du bus est un court épisode de sa vie ; en effet, c’est une militante de longue date des droits civiques américain.
De plus, ce n’est pas la première fois qu’un Noir refuse d’obéir aux règles révoltantes de la ségrégation raciale. Bien d’autres femmes ont désobéi avant elle, dès 1884, mais Rosa Parks est éduquée, mariée et sa réputation n’est salie par aucun scandale. Elle est la respectabilité incarnée. La NAACP cherchait effectivement un prétexte pour mettre en place une action en justice afin d’abolir la ségrégation dans les transports en commun uniquement. « Non elle n’est pas devenue accidentellement Rosa Parks »
Une icône de la lutte pour les droits des Noirs
Ed Nixon demande à Clifford Durr, un avocat blanc sympathisant de la cause des Noirs, de la défendre lors de son procès. Elle écope alors d’une condamnation avec sursis et d’une amende de 10 dollars. Lors de ce procès, il transforme la défense de sa cliente en une manifestation contre la ségrégation et l’élève au rang d’icône de la lutte pour les droits des Noirs. C’est la première fois qu’une femme est mise en avant par le mouvement et occupe le devant de la scène dans la lutte contre la ségrégation.
Suite à cet évènement, des militants groupés autour d’un jeune pasteur Noir encore inconnu, Martin Luther King, organisent un boycott des autobus de la ville. Cette action non violente, inspirée de celles de Gandhi, est une première dans l’histoire de la lutte des Noirs aux USA. C’est le début des campagnes de protestation non violentes et de désobéissance civile. Privée de recettes, la compagnie d’autobus cède au bout de 381 jours et abroge la ségrégation dans ses transports.
“Il arrive un moment, mes amis, où les gens en ont marre d’être plongés dans l’abysse de l’humiliation où ils connaissent la désolation d’un désespoir lancinant.” Martin Luther King.
Cette victoire sera entérinée lors du procès en appel de Rosa Parks auprès de la cour suprême d’Alabama, déclarant inconstitutionnel la ségrégation raciale dans les transports public le 5 juin 1956, jugement confirmé par la cour suprême des Etats Unis en décembre 1956.
La fuite pour préserver sa sécurité
Après cette médiatisation soudaine et craignant pour sa sécurité, Rosa Parks part vivre dans le nord à Hampton d’abord puis à Détroit dans le Michigan. Elle travaille d’abord comme couturière, tout en continuant à militer pour les droits civiques. Elle finit par rejoindre l’équipe du représentant démocrate du Michigan, l’Afro-Américain John Conyers à la Chambre des représentants des États-Unis, pour lequel elle travaille jusqu’à sa retraite en 1988.
En 1979, la NAACP décore Rosa Parks de la Médaille Spingarn, sa plus haute distinction. Elle reçoit par ailleurs de nombreuses distinctions dont la Médaille d’or du Congrès (Congressional Gold Medal), la plus haute distinction décernée par l’organe législatif américain.
A la fin de sa vie, Rosa Parks peine à payer son loyer et doit faire appel à la générosité de son église. Elle souffre d’une maladie neuro dégénérative. Elle termine sa vie pauvre, couverte de dettes, souffrant d’une tumeur à la gorge et d’ulcères à l’estomac, qui l’emportent le 24 octobre 2005.
A sa mort, la classe politique lui rend hommage : le président George W. Bush honore sa mémoire dans une allocution télévisée, sa dépouille reste exposée deux jours dans la Rotonde du Capitole des États-Unis pour un hommage public, privilège réservé d’habitude aux hommes politiques et aux soldats. Des milliers de personnes et de nombreuses personnalités comme Bill et Hillary Clinton, le pasteur Jesse Jackson, assistent à ses obsèques.
Celles qui a Osé dire « NON » à la ségrégation n’a pas combattu en vainc : des mesures seront prises pour interdire toute forme de discrimination dans les lieux publics, les tests et autres taxes pour devenir électeur aux États-Unis seront supprimés, et la légalisation des mariages mixtes seront autorisés dans tout le pays par la cour suprême des États Unis.
Violaine B – Celles qui Osent
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